LA CANAILLE
Joseph DARCIER - Alexis BOUVIER

Dans la vieille cité française
Existe une race de fer
Dont l’âme comme une fournaise
A de son feu brûlé la chair.
Tous ses fils naissent sur la paille
Pour palais ils n’ont qu’un taudis
C’est la canaille, et bien j’en suis.

Ce n’est pas le pilier du bagne
C’est l’honnête homme dont la main
Par la plume ou le marteau gagne
En suant son morceau de pain.
C’est le père enfin qui travaille
Les jours et quelquefois les nuits
C’est la canaille, et bien j’en suis

C’est l’artiste, c’est la bohème
Qui sans souper, rime, rêveur,
Un sonnet à celle qu’il aime
Trompant l’estomac par la coeur.
C’est à crédit qu’il fait ripaille
Qu’il loge et qu’il a des habits
C’est la canaille, et bien j’en suis.

C’est l’homme à la face terreuse
Au corps maigre, à l’oeil de hibou
Au bras de fer, à main nerveuse
Qui sortant d’on ne sait pas où
Toujours avec esprit vous raille
Se riant de votre mépris
C’est la canaille, et bien j’en suis

C’est l’enfant que la destinée
Force à rejeter ses haillons
Quand sonne sa vingtième année
pour entrer dans nos bataillons.
Chair à canon de la bataille,
toujours il succombe sans bruit
C’est la canaille, et bien j’en suis.

Ils fredonnaient la marseillaise,
Nos pères les vieux vagabonds
Attaquant en quatre-vingt-treize
Les bastilles dont les canons
Défendaient la vielle muraille.
Que de trembleurs ont dit depuis
C’est la canaille, eh bien j’en suis.


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